Quand lire la première figure d’un papier évite de trop se fatiguer…

Le résultat d’une grand étude (EVOLVE) chez le patient dialysé a été publié dans le NEJM. L’objectif était de savoir si la prescription du cinacalcet, un agoniste du recepteur sensible au Calcium, améliorait la survie des patients hémodialysés et diminuait la survenue des événements cardiovasculaires par rapport à un placebo. Nous savions que les résultats étaient négatifs depuis quelques mois. Ce n’est pas un travail qui me passionnait à la base, je dois bien le reconnaitre. Je suis allé jeter un coup d’œil au papier, car il me parait difficile pour un médecin de ne pas lire les études majeures dans son domaine. Je n’ai pas été déçu.

Après la lecture de la première figure, je me suis arrêté.

Et oui, de façon impressionnante sur 3883 patients, 2665 (68%) ont arrêtés la molécule qu’ils étaient sensés prendre. Si on enlève les 490 transplantés, il reste quand même 2175 (56%) patients qui ont arrêtés pour une raison ou une autre, je vous laisse regarder les causes tranquillement. Et il y a bien pire, un truc totalement inimaginable, 662 (222 dans le groupe cinacalcet et 440 dans le groupe placebo) patients (17%) ont commencé la drogue étudiée dans l’étude en prenant la forme commercialisée. Ce qui veut dire que des patients prenant déjà du Cinacalcet vont en prendre en plus. Je suis totalement sidéré de l’inconsistance des investigateurs. Comment peut on prescrire la molécule sur laquelle on travaille dans un essai thérapeutique? C’est complétement fou.

Le nombre important d’arrêt et cette folie prescriptrice ont eu raison de mon faible intérêt pour l’article. J’ai arrêté ma lecture à cette figure. Je suis par contre allé lire l’éditorial qui est remarquable. Il soulève les même problèmes que moi. Pour les deux auteurs, il faut que nous revoyons (investigateurs et régulateurs) toute la chaine qui autorise la mise sur le marché de molécules n’ayant pas encore fait la preuve de leur efficacité. Pour les investigateurs, il faut trouver des solutions pour limiter les arrêts aussi fréquents. Je prend cet échec comme un échec de l’ensemble de la communauté néphrologique. J’ai franchement honte en regardant cette figure. Cet échec doit être un électrochoc, il faut en sortir par le haut.

Il faut que nous évoluions.

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3 réponses à Quand lire la première figure d’un papier évite de trop se fatiguer…

  1. doudou dit :

    décadence du Nejm aussi!

    • PUautomne dit :

      Je ne suis pas sur, le NEJM joue son jeu de l’impact factor. Ils savent que ce papier sera cité et cité et encore cité. Donc ils l’acceptent pour ne pas le laisser à la concurrence. Jeu d’un éditeur classique et puis il y a le nombre de tirés à part que le laboratoire va commander qui a du un peu influencer la décision. On peut le prendre comme une décadence, mais tant que les journaux majeurs joueront le scoop avant tout, il en sera ainsi et ce n’est pas prêt de finir…

  2. panouf dit :

    j’ai eu une présentation de papier par un visiteur médical, j’ai eu du mal à ne pas rire!
    Quand je pense qu’ils n’ont même pas fait l’ana lyse en traitement reçu ou en per protocole, mais ITT!!!!

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