Semaine 30

Médecine

J’aime la génétique, j’aime l’idée que grâce au génotypage nous pourrons mieux soigner, prévenir et pourquoi pas guérir. La médecine dite personnalisée fait rêver, patients, décideurs, investisseurs, médecins. On nous promet le grand soir de la prédiction depuis bien 10 ans. La réalité est malheureusement moins glamour que les fantasmes vendus. Une belle illustration des limites de l’intérêt de la pharmacogénomique est celui des AVK. Il est difficile chez certains patients d’obtenir un bon équilibre de l’INR. Les gènes impliqués dans la variabilité de la réponse ont été identifiés. Il était tentant d’imaginer qu’une prescription adaptée aux données génétiques permettraient de faire mieux qu’une prescription à l’aveugle. Une méta analyse du JAMA internal medicine montre que malheureusement ce n’est pas le cas. La stratégie utilisant les données du génotype n’améliore pas une approche clinique pure. Je ne vois aucune raison de proposer la recherche de SNP dans VKORC1 ou CYP2C9. Cet article nous montre sur un problème relativement simple l’inefficacité de l’approche pharamacogénétique actuellement. Comment l’expliquer? Pas assez de gènes étudiés ou de SNP, d’autres facteurs plus puissants que la génétique pour expliquer la variabilité, etc. Il ne faut pas désespérer mais quand je vois des articles prédisant que la médecine personnalisée va régler tous les problèmes en deux coups de cuillères à pot, je ris.

De la beauté de la génétique en population isolée, l’exemple du Groenland avec le diabète de type 2 et le gène TBC1D4.

Le givre d’urée (uremic frost) un signe clinique d’insuffisance rénale chronique terminale que nous ne voyons plus en occident. Pour ne pas oublier, cette image tirée d’un article indien. Les petits dépôts blancs qui ressemble à du givre sont composés d’urée.

givre d'urée

Un papier qui va faire du bruit et qui va être responsable d’une épidémie d’articles dans les 5 ans qui viennent. Les auteurs de cette méta-analyse ont découvert un lien entre hépatopathie non alcoolique grasse (NAFLD) et maladie rénale chronique. Il s’agit d’un lien statistique assez fort qui doit pousser les gastro-entérologues à évaluer la fonction rénale et la protéinurie de leurs patients. Je ne sais pas si le lien physiopathologique allégué dans l’article est vrai. Je le trouve un peu fumeux, deux anomalies fréquentes sont associées, bon OK, reste à comprendre le lien et démontrer que traiter l’une ou l’autre a un impact. L’accouchement de la publication a été douloureux presque un an entre la première soumission et l’acceptation. Je vous conseille l’éditorial qui accompagne l’article, il explique bien les risques d’une médicalisation de deux entités qui posent questions. En tout cas, si vous n’avez pas de sujet de recherche, vous lancer la dedans en y mettant un peu de microbiome me parait plein d’avenir.

Place de l’épuration extra-rénale dans l’intoxication aux barbituriques.

Éviter les erreurs de dosage, juste en passant au système métrique. On ne répétera jamais assez à quel point le bon outil de mesure est indispensable en médecine.

Traitement initial du syndrome néphrotique de l’enfant, 2 mois de traitement pas inférieur à 6 mois. Il faudrait essayer ça chez l’adulte.

Augmenter le HDL cholestérol est inutile, pas d’impact sur la survie et les événements coronariens, un mauvais argument pour l’utilisation des fibrates. Une belle preuve que l’observationnel ne propose que des pistes qui doivent être testées rigoureusement.

Une bonne revue sur les effets indésirables rénaux de quelques drogues récréatives comme le MDMA ou la cocaïne. Devant toutes insuffisances rénales ou hyponatrémies penser à poser la question prenez vous une drogue.

Le suicide assisté en chiffre.

Il est des articles dont tu ne sais pas quoi penser. Cet article sur la préeclampsie fera date ou va être infirmé rapidement. Il a été montré  que le PlGF est un critère majeur dans le diagnostic de la préeclampsie entre la 20é et 35é semaine d’aménorrhée dans un très beau papier de recherche clinique. Les auteurs proposent que le placenta des patientes avec une préclampsie produit plus de secretases que normalement. Ces enzymes vont modifier la structure de certaines protéines qui passent dans les urines. Ainsi ces protéines mal-conformées vont être détectable dans les urines avec un test simple reposant sur l’utilisation du bon vieux rouge congo. Le test est très efficace dans le diagnostic mais aussi la prédiction du risque de survenue de PE. Ce papier est déjà le papier de l’année dans le domaine, il est même un peu trop parfait. Attendons la validations de l’utilité du test avant de nous emballer.

Le NEJM de la semaine, nous fait rêver et dans le même temps fournit l’antidote à nos rêves. Un article qui fera date d’une équipe française montre que dans le syndrome des antiphospholipides, il existe une activation endothéliale de la voie mTOR et qu’un traitement par inhibiteur de cette voie pourrait prévenir certaines complications en particulier rénales. Il s’agit peut être d’une avancée majeure dans cette maladie si difficile à prendre en charge. L’antidote est dans le même numéro, il apparait sous la forme d’une lettre, bien que pour la pratique, les informations contenues sont essentielles. L’utilisation des robots en chirurgie est à la mode, très à la mode. On prête à ces machines toutes les vertus. Elles justifient que les hôpitaux dépensent des fortunes pour en acquérir. Ces promesses reposent sur des études ouvertes, rétrospectives, sans randomisation, sur de la science un peu molle quoi. Une équipe américaine a mené une étude randomisée comparant chirurgie classique et utilisation du robot pour des cystectomies radicales. L’objectif principal était les complications périopératoires. Il n’y a pas de différence significative entre les deux approches. Sur la durée de séjour à l’hôpital, pas de différence, par contre les patients opérés par le robot passent en moyenne 2 heures de plus en salle d’opération en saignant un peu moins. Ce travail va contre un intérêt majeur de ces machines sauf en terme de gadget ou de produit d’appel. L’idée de passer 2 heures de plus ne m’inciterait pas à choisir cette option chirurgicale. Ce papier nous rappelle qu’avant d’adopter une stratégie thérapeutique, il faut confirmer son intérêt par des essais randomisés. Avant de vous jeter sur le sirolimus pour traiter les SAPL, incluons les dans une belle étude randomisée en double aveugle.

Science

A quoi ça sert d’avoir des bactéries dans son tube digestif? Un bel exemple avec ce rongeur qui mange des toxiques.

La bilirubine, un néphroprotecteur? Peut être en tout cas cette revue extensive le suggère. Je ne suis pas convaincu par tout mais je pense qu’il va être de plus en plus difficile de passer des papiers stress oxydant au cours de l’insuffisance rénale chronique sans la donnée bilirubine non conjuguée.

Tout savoir sur la carbamylation des protéines grâce à ce très bon article d’AJKD, ou quand l’urée se dégrade en cyanate pour  modifier les fonctions de nos protéines.

Divers

Je vous conseille ces trois minutes d’intelligence sur notre société si étrange, ça parle de lenteur, de vitesse, de fait divers, brillant.

Mot de la semaine

Et pour finir

Ce contenu a été publié dans revue de web, avec comme mot(s)-clé(s) , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , . Vous pouvez le mettre en favoris avec ce permalien.

2 réponses à Semaine 30

  1. nfkb dit :

    Je connais un patron de chirurgie qui raconte à chaque fois que le robot c’est : »l’équivalent de la coelio pour les nuls » et moi je le cite à chaque fois que tu parles de robot 😉

    En tout cas, pour nous gaziers c’est relou. Je pense qu’aujourd’hui ça relève de l’affichage publicitaire

  2. docteurdu16 dit :

    Le paradigme de la médecine prédictive est une nouvelle façon de nous faire accepter les big data qui sont une menace fondamentale pour les individus comme pour le secret médical. Les pubs personnalisées arriveront, grâce au big data, sur nos adresses email et autres FB et tweeters.
    C’est une resucée de la fameuse étude Framingham qui a permis les statines pour tout le monde et les McDo et Coca pour tous.
    Le numéro 406 d’Esprit (juillet 2014) en fait le tour et ce n’est pas fameux.
    C’est en rapport avec le livre commenté en ce site « Le corps marché » de Céline Lafontaine.
    Bonne journée.

Répondre à nfkbAnnuler la réponse.

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.