Aryl Hydrocarbon Receptor et événements thrombotiques.

Aryl Hydrocarbon Receptor (AHR) est un facteur de transcription. Ses ligands sont des xénobiotiques, historiquement la dioxine. Depuis plusieurs années, des ligands endogènes ont été identifiés. Nous et d’autres avons montré que des solutés dérivant du métabolisme du tryptophane, comme les toxines urémiques indoliques, activent AHR in vitro. Récemment je vous ai parlé de notre article paru dans JASN, sur l’impact de ces toxines sur l’expression d’un transporteur de médicaments, P-gp. La semaine, où nous avions reçu l’acceptation de l’article, nous avions un deuxième article sur AHR dans la maladie rénale chronique accepté, cette fois ci dans Kidney International, il est enfin en ligne. J’espère revivre une semaine de ce type, pas sur d’y arriver.

Dans cet article nous montrons chez l’homme et chez la souris, qu’aryl hydrocarbon receptor est activé in vivo au cours de la maladie rénale chronique. Pour évaluer le potentiel d’activation du sérum des patients nous utilisons un bioassay, dénommé callux.

Ceci permet de mesurer l’ensemble des solutés activant et inhibant AHR dans le sérum des patients. Ce système marche très bien. Nous avons ainsi pu montrer que les patients avec l’activation d’AHR la plus importante avait un risque plus important de présenter un événement cardiovasculaire majeur. Les événements cardiovasculaires majeurs sont en rapport avec la survenue d’un thrombose dans une artère.

Notre hypothèse est qu’AHR en activant l’expression du facteur tissulaire augmente le risque thrombotique. Nous avons de plus montré que les gènes contrôlés par AHR ont une expression augmentée chez les patients avec une insuffisance rénale dans le sang total et chez les souris avec une insuffisance rénale dans les vaisseaux et le cœur. Nous confirmons l’hypothèse que nous avions faites, l’insuffisance rénale chronique par l’accumulation des toxines urémiques met en jeu les mêmes phénomènes moléculaires que l’exposition à des xénobiotiques comme la dioxine. Les résultats ainsi obtenus peuvent être proposé pour expliquer  le sur-risque cardiovasculaire observé chez des personnes exposés à des agonistes d’AHR, comme la fumée de cigarette ou la pollution atmosphérique.

Comme pour confirmer nos données, le groupe de Chitalia vient de publier dans JASN ASN.2017080929.full, un article montrant que les toxines urémiques activent AHR et l’expression du facteur tissulaire dans deux cohortes, une de patients avec une insuffisance rénale sévère et l’autre issus de TIMI-2. L’augmentation des toxines urémiques, indoxyl sulfate et kynurénine dans la cohorte avec une IR sévère et kynurénine seule dans la cohorte IR légère, l’augmentation de l’activation d’AHR par le sérum des patients et l’augmentation de l’activation du facteur tissulaire par le sérum sont associés à une augmentation du risque d’événements thrombotiques au niveau de la fistule artério-veineuse ou des coronaires. Il confirme l’effet procoagulant de la kynurénine dans un modèle murin de thrombose artérielle.

Cet article et le notre montre que l’activation d’AHR est un facteur majeur pouvant être responsable de l’acquisition d’un profil pro-thrombotique par la paroi vasculaire. Aryl hydrocarbon Receptor est un acteur important dans la survenue des complications cardiovasculaires. Cette histoire commençée il y a 5 ans devient passionnante.

Si vous n’êtes pas convaincu par l’intérêt de ce facteur de transcription, je vous conseille la lecture de cette excellente revue sur son rôle dans l’immunité 1-s2.0-S1074761317305708-main.

Je déclare un conflit d’intérêt majeur pour cette note. Je travaille sur aryl hydrocarbon receptor et les toxines urémiques.

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3 réponses à Aryl Hydrocarbon Receptor et événements thrombotiques.

  1. nfkb dit :

    Salut !

    Merci de partager tout ça 🙂 Qu’est-ce que ça donne les inhibiteurs d’AHR ? ça sème la zizanie car ça éteint des voies importantes par ailleurs ou ça pourrait améliorer le risque thrombotique ?

    bye

  2. Adrien Keller dit :

    Bonsoir.
    De la belle recherche! Félicitations.
    Impressionnante revue des bostoniens. On en vient à douter vu la complexité du système étudié au stade actuel des connaissances qu’effectivement une quelconque thérapeutique puisse un jour être “ciblée” d’une manière ou d’une autre.
    En terme d’effets potentiellement contradictoires étonnant enfin de retrouver là notre ami le brocoli encore un légume à la mode dans les magazines.

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