De l’imposture comme un art à risque

Si vous donnez des IEC pour améliorer l’artériopathie des membres inférieurs, il ne faudra plus citer cet article,  je l’avais bien aimé à sa publication. Le design était simple et les résultats convaincants. Malheureusement, il vient d’être retiré du JAMA en raison d’une fraude. Le premier auteur a reconnu l’invention d’une partie des données.

Je me demande ce qu’il passe dans la tête d’un scientifique pour croire qu’un jour ses manipulations ne seront pas découvertes. Inventer des données est une chose qui me dépasse.  Que ce passe-t-il dans la tête d’un imposteur ? Comment arrive-t-il à trafiquer les données? Est ce qu’on commence à arrondir les résultats pour que ce soit plus joli? Est ce que dès le début on invente les données en remplissant le tableur? Est ce qu’on remplit des cases vides pour ensuite arrondir? Est ce qu’on falsifie dès le cahier de recueil? J’aimerai bien savoir. Je me demande comment on en arrive là.

Ici, une chose est sur, ce n’est pas big pharma qui est responsable de la manipulation, le ramipril ne doit plus rapporter grand chose au labo qui l’a inventé. Comme quoi pas besoin d’être vendu à l’industrie pour tricher. Les conflits d’intérêt ne se limitent pas à des gains immédiats ou décalés en espèces sonnantes et trébuchantes mais probablement dans un désir de se voir en haut de l’affiche.

Si vous n’avez pas d’idée de recherche pour un prochain PHRC, le sujet vous tend les bras. Tout est écrit, le protocole, l’article. Il suffit de copier. Le rationnel n’est pas mauvais, une petite étude conforte l’hypothèse et comme vous serez le premier vous pourrez faire un gros papier. J’ai une mentalité de charognard. S’agit il de plagiat si on fait une étude retirée de la littérature en utilisant le design publié? Une belle question d’éthique appliquée à la recherche.

Source : « Fabricated results » retract JAMA clinical trial, plus a sub-analysis of the data – Retraction Watch at Retraction Watch

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2 réponses à De l’imposture comme un art à risque

  1. Une bonne connaisseuse du domaine m’affirme depuis toujours que les pires fraudeurs sont les universitaires et non les industriels…
    Pour comprendre leurs motivations, lire ou relire « La souris truquée ».
    http://www.franceinter.fr/emission-la-bibliotheque-scientifique-ideale-la-souris-truquee-enquete-sur-la-fraude-scientifique-de

  2. Docteurdu16 dit :

    Bonjour,
    Les attachés de recherche clinique (ARC) qui contrôlent les données des essais cliniques en tant que salariés de l’industrie ou de sociétés prestataires savent que la première chose à vérifier est la matérialité du patient entré dans un essai. Pour le reste, c’est plus compliqué : véracité des données, examens faits ou non, et cetera.
    Les industriels sont confrontés à la fraude des expérimentateurs cliniciens, la constatent mais… ne la dénoncent jamais pour des raisons commerciales.
    Certains services sont connus pour frauder et ne sont jamais inquiétés. Certains « grands » services sont dans le deal. Car c’est leur signature qui compte pour la publication.
    C’est un marché de dupes.
    Il avait été prévu d’inscrire les fraudeurs sur une liste noire mais cela n’a jamais abouti.
    Les universitaires le font pour publier, pour gagner de l’argent et pour progresser dans l’université.
    La fraude des industriels est plus subtile et plus grossière : protocoles fabriqués, statistiques arrangées, dossiers oubliés ou non inclus et, plus grave, levée précoce de l’anonymat sans en tenir compte dans l’analyse finale.
    Les fraudeurs pensent, parce qu’ils sont malins, qu’ils ne seront jamais pris…
    Dans de grands essais internationaux tout e monde sait que de grands centres n’ont jamais inclus aucun malade.
    Bonne journée.

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