Je viens de découvrir avec effroi la proposition de loi d’un député UMP, Daniel Fasquelle.
Elle ne comporte qu’un article:
« Article unique
Les pratiques psychanalytiques, sous toutes leurs formes, doivent être abandonnées dans l’accompagnement des personnes autistes, au profit de traitements opérants, les méthodes éducatives et comportementales en particulier.
Une réaffectation de l’ensemble des moyens à ces modes de prise en charge doit être exigée. «
C’est court, c’est clair et ça m’angoisse terriblement. Comment un député, professeur de droit a pu imaginer ce texte.
Je n’ai aucune opinion sur le fond. Je ne comprend rien à l’autisme. Je ne m’y intéresse pas vraiment. Je lis de temps en temps des articles sur le sujet. Je n’ai donc strictement aucune idée de comment il faut prendre en charge un enfant autiste et la meilleure façon de le faire. Juste pour illustrer la complexité du problème, je vous conseille de lire le positionnement et les travaux passionnants de cette équipe canadienne. Elle a beaucoup de mal à travailler car le lobby educativo-comportementaliste, l’étouffe. Et oui, l’autisme c’est compliqué, monsieur le député.
Par contre, je pratique la médecine depuis un certain temps. Malgré tout, j’aime ce métier. Je suis néphrologue, professeur des universités, on peut dire, si ça a du sens, que la communauté m’a reconnu certaines qualités pour me placer « au sommet » de la hiérarchie médicale. Je n’aime pas cette idée de hiérarchie dans le monde médicale. Je prends en charge des insuffisants rénaux depuis 1993 (début de mon internat). J’ai bien du mal à dire quel est le meilleur traitement à proposer pour la prise en charge de l’insuffisance rénale chronique terminale.
Dans l’absolu, je le sais ou du moins j’ai des convictions. Il faut proposer une transplantation rénale préemptive à partir d’un donneur vivant. Je sais aussi que je ne peux pas proposer ce traitement idéal à tous le monde. Pour certains patients, la transplantation n’est pas le meilleur traitement, pour des raisons médicales, personnelles, sociales. Alors on ne fait pas, et heureusement nous avons d’autre solutions, la dialyse et parfois simplement le traitement conservateur. Nous faisons du cas par cas. Nous faisons de la médecine personnalisée, sans la génomique, sans les biomarqueurs, sans l’imagerie de pointe, juste en parlant avec les patients, leurs familles, et les autres membres de l’équipe soignante. Ce truc hallucinant que je fais, ça s’appelle le soin.
Ce texte me fait peur.
Il nie complétement ce pourquoi je me bats. Un traitement personnalisé, respectant le cadre du savoir scientifique, mais adapté à l’homme ou à la femme que j’ai en face de moi, à son histoire, à ses désirs. Demain, un député bien intentionné pourra proposer un texte de loi disant que l’hémodialyse c’est pas bien et qu’il ne faut plus faire que de la transplantation rénale. Nombres de mes patients et de leurs familles seront bien embêtés.
Je ne crois pas aux solutions miracles. Je ne crois pas à un médicament ou une attitude thérapeutique qui résout tout les problèmes d’une maladie chez tous les patients, surtout quand on s’adresse à un spectre aussi large que l’autisme. Je crois en la complémentarité des approches, sans à priori, en ayant comme unique objectif le patient et son entourage, loin de batailles de clochers sans intérêts. Je ne supporte pas cette vision réductionniste de la médecine. C’est une négation totale du soin comme je l’envisage.
Le soignant n’est ni un artiste, ni un scientifique. Il est entre deux. C’est ce qui rend ce métier difficile et passionnant. Le soignant est dans une tension permanente entre ces deux pôles. Nous sommes des équilibristes. Parfois nous pouvons être des scientifiques purs et durs quand la science nous en donne l’opportunité, nous sommes rarement des artistes purs et durs. Il faut du temps et libérer la parole.
Pour moi la médecine est un artisanat ou du hacking, nous utilisons nos connaissances pour faire l’objet,le plus parfait pour un individu donné, à un instant donnée. Nous ne devons nous coupé d’aucun outil de soins. Le but est que l’individu a aille mieux sans gréver son pronostic à plus long terme. Et parfois il faut être moins bien pour espérer guérir demain.
Voilà pourquoi ce projet de loi me révulse. Je suis convaincu qu’il part de bons sentiments. Malheureusement, l’enfer est pavé de bonnes intentions. Il est une attaque en régle contre la liberté du soignant a établir avec son patient un projet thérapeutique individualisé en ne laissant de coté aucun outil thérapeutique. Si ce n’était pas aussi grave, ceci pourrait prêter à sourire, les anti-psychanalyses ont la même attitude dogmatique qu’ils dénoncent chez les analystes.
La médecine est un savoir mouvant qui progresse et parfois régresse chaque jour. La vérité d’aujourd’hui, n’est pas celles d’hier et certainement pas celles de demain. Le savoir et le soin sont des fleurs fragiles qui ne poussent pas derrière les murs gris de lois dénués de sens.
bien dit! spontanément encore plus violent que les politiques soient démagogues est une chose que les juristes dèlirent une autre je crains pire avec le caractère normatif des recommandations( arrêt CE formindep Has) d
Dans la même veine un décret paru au Journal Officiel du 26 juin 2011 a « décrété » (c’est le cas de le dire) que l’Hypertension Artérielle Sévère constituait un facteur de risque et non une pathologie avérée.
Légiféré sur la santé est contre productive. L’organisme humain n’est pas un texte de Loi, pas la Justice mais la Nature qui a son mode de fonctionnement qui ne se soumet et ne se soumettra jamais à la volonté humaine, y compris celle des politiciens.
Ce qui me met plus encore mal à l’aise est jusqu’où iront les lois, les règlements? et surtout que ce se cache derrière? est-ce un moyen de bouche un trou médical en enlevant les moyens médicaux d’un secteur vers un autre? Ce qu’on a déjà vu dans le domaine de la Justice avec la fermeture de tribunaux. Quelle est la motivation? Qui est derrière (un lobbing, si oui lequel?). Je m’arrête là, sinon ensuite je vais délier à la Fox Mulder dans X Files.
Une chose encore, devant l’incapacité des politiciens (de toute orientation politique), dans le domaine médical c’est aux médecins de prendre position sur quelle médecine veulent-ils pratiquer dans l’avenir, mais aussi aux malades actuels quels soins attendent-ils et à chacun de nous (potentiellement pouvont être un jour un malade et sûrement âgé) quels soins attendons-nous? que sommes nous prêts à faire pour que le système marche. Là, le politique n’a pas le rôle principal, seulement un rôle secondaire mais malheureusement il a su prendre la position clé (ou donne au moins cette impression).
Bonne soirée
PS Perrucheenautomne avec votre billet Nr 111 vous m’avez fais passer un mauvais moment – merci.
C’est effrayant à plus d’un titre: en lisant le rationnel de la proposition que tu as eu la gentillesse de mettre en lien (et il faut relativiser: ce n’est qu’une proposition de loi, on sait ce quelles valent en période électorale), on s’aperçoit qu’il s’agit d’une attaque contre la psychiatrie française. Il sous entend que nombre de praticiens n’utilisent pas les classifications nosologies internationales (ce qui est vrai car la CIM-10, d’inspiration anglo-saxonne, est parait-il très réductrice selon la vision française s’inscrivant dans une lignée différente) et qu’il faut épurer les pratiques, ne privilégier qu’une seule façon de penser.
La diversité n’est pas un luxe, cultiver la différence en médecine est à mon sens essentiel. La psychiatrie a su conserver cet esprit -contrairement au reste de la médecine-, mais pour combien de temps encore? Cette façon de pensée stérilisante est d’autant plus dangereuse en psy car elle touche à la notion de normalité et se frotte à d’autres notions plus philosophiques que scientifiques. La science médicale seule (et plus précisément l’anglo-saxonne, la plus influente) ne peut faire force de loi dans ce domaine plus qu’ailleurs.
J’aime quand tu parles de renforcer le côté « art » de la pratique. J’aime aussi lire les articles plus science « hard-core » que tu nous ponds régulièrement, même s’ils sont moins fréquents (et commentés) en ce moment. Tu m’as traité un jour de communiste. Méfie-toi, tu le deviens 😀
PS: juste pour info: comment as-tu « découvert » ce projet de loi? Parce que franchement Daniel Fasquelle, fallait trouver…
J’ai découvert le projet de loi grace à Hospimedia.
Pour moi communiste n’est pas insulte, tout dépend comme on envisge le truc.
Mon but n’est en aucun de défendre la psychiatrie à la française. Je n’ai pas les compétences et le gout de ça.
Ma note a juste pour but d’alerter sur des dérives legislatives qui peuvent être dangereuses et une utilisation à mon avis non raisonnable de la loi.
Au départ, j’avais envie de partir sur un commentaire du style « bienvenue dans le monde des bisounours, Stéphane et John Snow ». Malheureusement, le drame vécu par les familles d’enfants atteints de troubles autistiques en France me paraît tel, que je renonce et vous invite à lire l’avis du CCNE (Comité Consultatif National d’Ethique) http://www.legislation-psy.com/IMG/pdf/CCNE-AVISN102_AUTISME.pdf reconnaît clairement notre retard dans la prise en charge de l’autisme (« La France a été condamnée par le Conseil de l’Europe en 2004 pour nonrespect de ses obligations d’accès à l’éducation à l’égard des enfants
souffrant d’autisme »).
Les théories psychanalytiques, les prises en charges « à la française » (cocorico, John Snow, « c’est nous qu’on est les meilleurs ») basée sur la psychanalyse qui se sont montrés au mieux inefficace, au pire délétères pour ces enfants.
Je suis tout à fait d’accord avec toi sur le caractère inutile (voire dangereux) de laisser le législateur interférer de la sorte, cette proposition de loi inutile est probablement parti d’une bonne intention : je ne sais pas si ce parlementaire a un membre de sa famille atteint de troubles autistiques ou si c’est simplement une sensibilisation par les témoignages (et surtout les appels au secours des familles), mais cela reflète une situation inadmissible en France et je n’irai pas plaindre un grand nombre de psy-(chiatres, chologues etc…) de culture psychanalytique qui ont refusé une saine et normale remise en question devant des méthodes inefficaces, un retard pris par rapport aux pays voisins (c’est vrai en majorité anglo-saxons ou nordiques). Ils ont donné le baton pour se faire battre, en attendant, ce sont plusieurs générations de patients et des familles qui ont souffert. Leur réveil actuel sur cette proposition de loi m’écoeure : au lieu de reconnaître qu’on a fait des erreurs, on protège son fond de commerce… (un petit coup de google pour John Snow et il verra un certain nombre de réponses).
La médecine, quelque soit la spécialité, doit toujours s’accompagner du doute, de remise en question. J’ai toujours détesté (voire plus) les dogmes enseignés par certains praticiens (beaucoup d’universitaires, hélas, Stéphane, alors qu’ils devraient être la crème des crèmes puisque étant « au somment de la hiérarchie » ;-)… Cultiver la différence à tout prix, n’est pas non plus forcément moins dangereux (Je suis d’accord avec Stéphane, je n’aime pas non plus cette idée de hiérarchie, je l’ai vue deux fois amener au décès de patients parce qu’un chef de service avait réussi imposer un mauvais diagnostic à son équipe, refusant toute discussion…).
Je ne suis vraiment pas persuadé que la psychiatrie à la Française soit actuellement un modèle en particulier dans la prise en charge des troubles autistiques et de la schizophrénie…
Mais je ne suis pas spécialiste de la question non plus, mais comme un néphrologue, un cardiologue, un anesthésiste ont donné leur avis, pourquoi pas un hématologue non plus ? Est-on lu par des psychiatres ici ?
Je ne vis pas dans le monde des bisounours quoique des fois j’aimerai bien. Je suis tout a fait d’accord avec le fait que ceux sont les analystes eux même qui se sont mis dans cette situation et en aucun cas je défends la prise en charge actuelle. Mais je ne pense pas que ce soit en jetant des anathèmes qu’on fera avancer la prise en charge de ces patients. Une collaboration entre différents acteurs venant de différents mondes permettra d’avancer. C’est la transversalité des approches dans les maladies complexes qui me semble intéressante. Je n’arrive pas à croire au remède miracle.
Je le répéte pour moi la médecine est ension et équilibre; tension entre la nécessité d’automatismes pour être efficient, pas besoin de tout reinventer tous les matins et celle de prendre en compte l’individu.
Après concernant les pathologies mentales, une des questions est celle de la place que nous avons envie de faire à ces humains un peu différents. Je conseille la lecture du lien vers le papier de nature dans ma note.
Moi aussi, j’aurais voulu vivre au pays des bisounours avant de repasser à la clinique ce soir pour découvrir que le médecin traitant m’avait raconté en partie des cracks sur le syndrome tumoral de sa patiente : une masse rétro-péritonéale qui englobe la VCI (que je ne vois plus), comprime le tronc porte qui est décrit comme thrombosé (je vois rien dans ce magma), masse qui remonte tellement haut qu’elle passe dans le médiastin pour commencer à comprimer les cavités cardiaques…
La patiente a des oedèmes des membres inférieurs depuis au moins un mois et demi (pas de BU stéphane, pas d’écho abdo, pas de biologie…), la RP et l’échographie qui montrent déjà superbement le syndrome tumoral datent d’il y a 10 jours, le scanner a été fait mardi et elle m’appelle un vendredi dans l’après-midi… VDM (et merci à ma femme de supporter que son homme soit rentré 4 soirs sur 5 après 20h30-21h)… Oui, je suis d’humeur geignarde ce soir et malheureusement, aucun parlementaire ne pensera à proposer une loi interdisant les entrées du vendredi soir…
ps : bon bonne nouvelle, le bilan que l’infirmière vient de me transmettre montre des LDH normales, la fonction rénale également (mais comment font les uretères pour passer là-dedans, mystère) et miracle le bilan hépatique aussi malgré une dilatation des VBIH…
« Est-on lu par des psychiatres ici ? »
Rp: Oui. Après, nous, on écoute surtout, hein, on donne pas forcément notre avis!
aborder la philosophie du droit à partir de la dérive d’un législateur est effectivement très loin de notre domaine technique voire de notre champ culturel mais il s’agit aussi simplement de notre espace civique donc notre parole est libre et pertinente par définition, les lois mémorielles sont idiotes et dangereuses selon la grande majorité des historiens je pense qu’il s agit de la meme démarche: les psys ont un problème compréhensible d’évaluation de leurs pratiques entre eux,avec leurs patients et une partie du corps social le débat n’a été politiquement qu’abordé sur le plan sécuritaire ces dernières années cette proposition n’est que l’extension de cette bétise
Cette proposition de loi, c’est de l’annonce, simplement de l’effet d’annonce.
Ce député, soit parce qu’il a un enfant autiste dans sa famille, soit parce qu’il a été « interpelé » par une association de sa circonscription, fait le malin et… le con.
Cela dit, le traitement de l’autisme à la française est une scandale absolu, un scandale idéologique lié aux épigones de Freud (qui ne savent pas lire le maître), aux épigones de Lacan, ce monstrueux imposteur, lié surtout à Bruno Bettelheim, menteur patenté de l’école de Chicago (qu’il a créée), menteur sur ses pratiques, menteur sur ses résultats, menteur même sur son récit de son internement en camp de concentration où il aurait façonné sa méthode.
Ce sont les analystes, à la suite de Bettelheim, qui ont introduit la théorie de la « mère froide » responsable de l’autisme. Vaste fumisterie machiste qui a conduit des centaines de mères au désespoir et à la culpabilisation.
Donc, il n’y aura pas de loi mais les analystes bornés et incompétents devraient se regarder devant une glace. Je ne donne pas de références car je suis au cabinet…
A +
Je suis tout à fait d’accord et encore une fois il ne me semble pas que ma note face l’apologie de la psychiatrie à la française et de l’approche psychanalytique dans l’autisme. Les analystes sont bien assez grand pour se défendre, et je pense qu’ils ont grandement déconné en refusant l’arrivée d’autres thérapies. L’intégrisme en médecine ce n’est pas bon.
Je suis incompétent dans le domaine, ce qui me dérange c’est qu’on veuille légiférer. Je suis bien d’accord c’est peut être uniquement un effet d’annonce, un jeu médiatique, mais c’est dangereux, parce que sur un malentendu parfois des lois sont votées et après, la porte est ouverte et il est difficile de refermer. On le voit bien avec l’inflation des lois sur la mémoire de tel ou tel groupe.
Les bornés et les incompétents existent dans tous les domaines! il en existe chez les » psy.. » comme chez les non « psy.. », comme chez les plombiers ou les représentants de commerce!
Par ailleurs , ne mettez pas tout le monde dans le même panier ! Que veut dire le traitement de l’autisme à la française ,k Rien ! C’est uine généralisation abusive. il existe des personnes autistes prises en charge en France à la française, pour leur plus grand bénéfice et ceux de leur familles. Quant à la culpabilité et le désespoir, ils existent plus ou moins chez les parebts sans l’aide d’a
sans l’aide d’aucune théorie !
Faire rentrer les patients dans des cases….. établir des protocoles pour chaque case, des protocole de bilan, de traitement, de surveillance …… et pour encadrer tout ça imposer une loi ou un décret…… le seul problème comme vous le dite si bien c’est que chaque patient est unique……….
Pour moi c’est partit ….. http://www.jesuisdegarde.com/
Merci de m’avoir donné envie!!
Oulà.
@ Doudou: Je n’ai jamais parlé d’une » psychiatrie à la Française », il s’agit d’une interprétation de ta part. Je vois dans la « psychiatrie française » (locution que j’ai utilisée) une diversité de pratique salutaire incluant entre autres la psychanalyse (la France en étant un berceau culturel, normal qu’elle y soit influente), la phénoménologie, la neurobiologie, l’anti-psychiatrie, la psychiatrie institutionnelle, les techniques cognitive-comportementales pour ne citer qu’elles… Que la psychanalyse soit le courant de pensée en vogue dans la prise en charge de l’autisme je n’en sais strictement rien, tu as parfaitement raison. Ce que je sais, c’est que ce texte attaque la psychanalyse dans cette indication certes, mais aussi en général avec des justifications foireuses (la CIM-10 se veut athéorique, mais est en fait fortement influencée par ces écoles de pensées. La psychanalyse y a été longtemps influente, le changement de terminologie n’est en fait que le reflet d’un revirement d’influence en faveur d’autres courants surreprésentés dans les pays anglo-saxons). La psychiatrie, en France, résiste plutôt bien à la pensée mono-idéique et je trouve ça bien (on peut aussi trouver que c’est réactionnaire, j’en conviens). Je pense aussi qu’en anesthésie, ainsi que probablement en néphrologie ou en cardiologie nous avons trop tendance à nous centrer sur des courants mono-idéiques, forcément anglo-saxons car la littérature médicale anglo-saxonne est la plus influente et c’est dommage (je ne sais pas si je me fais bien comprendre, mais l’idée est là).
C’est marrant, ces critiques faites de la psychanalyse dans le texte de loi ou les commentaires… Ce sont les mêmes qui ressortent depuis 100 ans…. Mais je les comprends, elles sont fondées au moins en partie.
Là où nous sommes tous d’accord, c’est que légiférer c’est vraiment de la connerie.
je me suis bien gardé de parler de psychiatrie,simplement de l’idiotie de la méthode législative,sur la thérapeutique ma seule posture est celle de l’analyse technique de l’EBM qui ne supporte qu’à peine l’idée de recommandations,les psys commencent à peine le chemin de l’évaluation: bonne route!
En fait c’est particulier, la psychiatrie s’apparente à l’EBM dans la majorité des pays du monde, avec des méthodes comportementales et cognitives, mais la psychanalyse et son désir d’échapper à toute évaluation survit dans le public en France (« grâce » à Lacan, Dolto…), Suisse, Argentine, Brésil.
Merci de rappeler qu’il n’y a pas une Vérité Une et universelle ! Chaque patient est particulier et unique, mais les moyens de l’aider sont multiples et divers en fonction de sa personnalité, son entourage, son histoire… et les personnes qui se proposent de l’aider ! Personne ne détient LA Vérité, ni les comportementalistes nio les Psychanalystes. La personne humaine est une imbrication du biologique et du psychique, l’oublier est une faute contre l’humain !
Je ne comprends pas votre idée. Comportementalisme = biologique ; psychanalyse = psychique ?
La psychanalyse n’est pas une méthode scientifique, par conséquent pas une méthode thérapeutique crédible.
La psychologie, ou science du psychique, ici comme méthode thérapeutique, a développé expérimentalement des modèles efficaces de guérison, de compensation ou de rééducation. Des TCC à l’ABA.
Pour étudier les astres, vous considérez qu’un astrologue et un astrophysicien ont des compétences égales ?
Bonjour. Je comprends votre point de vue, si vous n’êtes pas informé de l’efficacité des pratiques psychothérapiques.
Contrairement à ce qu’on pourrait penser, le législateur est finalement bien placé pour cette prérogative.
En psychothérapie comme par ailleurs, tous les tentatives de soins ne se valent pas.
Il y a des thérapies/méthodes de rééducation plus adaptées à un cas, ou à un autre, et cette spécificité des attentes du patient se juge à l’expérimentation, guidée d’une approche à une autre par le clinicien expérimenté. ABA, PECS, TEACCH… L’individualité du sujet n’est vraiment pas négligée, le principe de ces méthodes est qu’elles sont très adaptables : on cible le problème, et une fois qu’on a trouvé la/les méthode(s) adaptée(s), on cherche à le résoudre de différentes manières dans ce(s) cadre(s).
Par exemple, la prise en charge ABA d’un autiste diffèrera toujours de la prise en charge ABA d’un autre autiste. Car le principe est justement de développer la méthode la plus apte à résoudre les problématiques chez le patient.
Et à côté de ça, il y a les tentatives de soin qu’il n’apportent rien de bon. Pour citer le psychanalyste A. Stevens qui « abdique l’idée d’une progression » dans la prise en charge de l’autisme, ça crée des Sabines (en référence au documentaire de Sandrine Bonnaire).
Un autiste dans un centre fermé, bourré de psychotropes et sans aucune méthode de soin crédible à côté, ça finit par faire désordre comme « cure ».
De la même manière, j’imagine qu’un législateur ne serait pas mal placé pour interdire le remboursement par la sécurité sociale de la pratique du magnétisme, qui manquant d’une méthode expérimentale se limite à un effet placebo
L’effet placebo c’est pas si mal, surtout en psychothérapie, mais à propos de troubles lourds comme l’autisme c’est quand même un taux de réussite moins important que dans une problématique dépressive, et c’est même une idée stupide (voire criminelle) quand on sait qu’on peut l’obtenir en parallèle d’une méthode expérimentale qui a fait ses preuves (les méthodes que j’ai cité en acronymes, par exemple).
Par conséquent, Daniel Fasquelle propose simplement que face à un trouble autistique, on utilise une méthode qui marche au lieu de se branler dans le formol.
À bientôt
Je ne pense pas que légiférer dans le soins soit une bonne idée. Encore un fois mon propos n’est pas de défendre telle ou telle pratique dans la prise en charge de l’autisme. Mon désir est d’éloigner la loi d’un champs aussi mouvant que le soin et de la relation soignant soigné. La vérité d’aujourd’hui ne sera peut être pas celle de demain. Le problème d’un texte de loi est qu’il ferme la porte à d’autres choses. Le dogmatisme dans le soin n’est pas bon.
Je suis d’accord dans le fond. Le législateur n’a rien à faire là, la Santé doit se préoccuper elle-même de la rentabilité des soins (un patient réadapté n’est pas un patient qui passera la fin de sa vie en hopital psychiatrique).
Et pourtant… dans les faits, les psychanalystes tiennent les unités, et lobbyent pour le rester. Il fallait faire quelque chose.
Je suis très sensible à la question de principe, imaginons que dans 20a un député victime de préjugés propose d’interdire les méthodes comportementalistes dans le traitement de quelque patho que ce soit. Dérive effrayante. Mais que faire d’autre, pour l’instant ? Continuer à placer ses enfants en Belgique pour avoir une garantie de résultats, et non en France où ces enfant en développement sont zombifiés ?
La psychanalyse fait du bien parfois, moins d’autres fois, mais dans le cas de l’autisme, elle a fait reculer la science et ruiné (à tout point de vue) des familles avec une obstination déplorable. Même si cette époque (Lacaniens, Bettelheimiens,…) est un peu passée, et que de nombreux psychanalystes admettent à présent l’incompétence de leur discipline au sujet de l’autisme, le mal est fait et il est temps de payer l’addition. Cette loi s’inscrit dans ce cadre, mais elle est bien gentille. Plutôt que de dire « on arrête et on oublie », il faudrait peut-être penser à faire l’inventaire et à obtenir des réparations.
1) Il serait plus judicieux d’interdire cette vaste farce du DSM4!!!
2) »L’élite » médicale est à l’image des représentants de cette même élite au sein de ce que l’on nomme « le conseil de l’ordre des médecins »,conservatrice,rétrograde,sans imagination,avide de pouvoir,ne défendant que les « forts » ,les tricheurs ou les escrocs!
Et donc,dans cette mouvance,on glorifie les thérapies comportementalo-cognitives,qui ne sont d’ailleurs pas des thérapies mais de simples techniques,et on en fait une pseudo-théorie!
La psychanalyse ne se quantifie pas en « points de guérison »,elle correspond aussi à une certaine éthique,comme « la vie » d’ailleurs.
Le manque de « structures » pour l’autisme ainsi que les carences dans l’accompagnement des parents n’est pas du fait de la psychanalyse.Les TCC n’y changeront rien.
Bonjour chers personnes et médecins qui tentez de maintenir de la pensée dans ce monde où penser et douter s’avère souvent honteux ou dangereux…
Je n’ai pas l’habitude de partager mes avis sur internet mais le sujet que vous abordez me semble fort important actuellement. Certes, comme l’écrit docteurdu16, ceci est probablement un effet d’annonce mais toutes ces annonces même si elles n’aboutissent pas à des actes ou des lois s’avèrent le reflet d’une maltraitante culturelle de la médecine, des différents corps de métier que cela soit dans le domaine de l’enseignement, de la justice, de la médecine, une maltraitante de la différence et de la pensée. Il s’agit pour les politiques de décider de nos compétences requises. Il est vrai que le rôle du politique est d’organiser la vie de la cité et que probablement leurs observations et les échanges avec nous doivent exister mais la dérive actuelle est assez totalitaire ou du moins extrêmement dévalorisante pour nos disciplines.
Je suis psychiatre et je trouve actuellement la psychiatrie extrêmement maltraitée… ou plutôt devrais-je dire mal soignée. Car la notion de soin, du prendre soin disparaît actuellement aussi bien dans le domaine de la médecine que dans l’enseignement au profit de traitement rapide et évalué avant même d’être vraiment mis en place. Evaluons avant de faire! évaluons avant d’essayer.
Il est évident qu’actuellement la psychiatrie souffre…. c’est son rôle, ma fois. Depuis toujours en fait elle souffre, coincée entre la médecine, la neurologie, la philosophie, la sociologie…Voulant devenir une discipline à part en dehors de la neurologie, elle cherche à présent à retrouver une légitimité en s’uniformisant à coups d’ efforts d’EBM et de classification internationales. Mais s’il nous faut bien un système neuronal pour penser, un hippocampe à peu près fonctionnel pour avoir des émotions et se souvenir, des réseaux neuronaux fort complexes pour acquérir et conserver le langage et le sentiment d’identité, la psychiatrie soigne aussi le mal-être, la relation, et tente malheureusement souvent de réparer les dégâts de l’exclusion sociale. La psychiatrie se débat en permanence pour définir son identité mouvante et menacée, ne pas devenir opératoire, ne pas être un instrument de la justice et de la police. Vous n’êtes pas sans connaître les difficultés de l’application de la nouvelle loi sans consentement et de la difficulté dans certains départements d’obtenir des levées d’HO. Qui fixe l’obligation de résultat des soins psychiatriques: la justice, le préfet, la société, les enseignants, les familles, le psychiatre ou le patient?
Dans cette difficulté à définir son identité, les courants différents parfois s’opposent, certains dominent à certains moments. Je rappellerai que c’est la psychanalyse qui a fait finalement de la psychiatrie une discipline à part de la neurologie et qui a permis qu’on cause à des fous (premier pas vers le maintien du statut de personne).. Je rappelle aussi l’importance du mouvement de l’antipsychiatrie qui énonce que c’est la société qui rend malade… Il s’agit alors de soigner la société.
Et puis le modèle bio-psycho-social s’est montré prédominant pour déterminer les facteurs étiologiques des troubles psychiatriques. Pour faire un trouve: une susceptibilité biologique (avec une part de génétique), et des interactions avec un environnement social et familial, des relations précoces. Il s’avère cependant fragile, ce joli modèle car probablement trop coûteux en effort de penser, en culpabilité…
Si la psychanalyse est un modèle qui ne peut prouver son efficacité et qui peut s’avérer dangereuse lorsqu’elle est mal digérée (comme le suggère aussi du16), les effets des relations précoces sont démontrés par de nombreuses études plutôt bien conduites aussi bien que chez l’adulte dans l’après-coup que chez les enfants par des études d’observation directe.
L’autisme autistise, écrit Golse. C’est peut-être le cas de la psychiatrie dans son ensemble.
Pour ce qui est de l’autisme, certaines associations de familles(UNAPEI) se sont mobilisées contre cette idée de loi. Elles ne souhaitent peut-être pas toutes que nous proposions à leur proche seulement des neuroleptiques, et des régimes diététiques spéciaux!! (on lit vraiment de tout dans les études)
et lien vers article du Pr. Golse dans Libé, et si l’Etat se mêlait de ses affaires et débat avec le président de vaincre l’autisme
essayons de ne pas trop être autistes dans notre travail!
à bientôt
La psychiatrie s’astique la nouille aussi là ?
A Winnibal :
Vous écrivez :
« Je rappellerai que c’est la psychanalyse qui a fait finalement de la psychiatrie une discipline à part de la neurologie et qui a permis qu’on cause à des fous (premier pas vers le maintien du statut de personne)., »
Je suis un peu étonnée : il semble que la psychiatrie en tant que discipline, les postes de professeurs de psychiatrie existaient déjà bien avant que la psychanalyse ne fasse vraiment parler d’elle (je suis en train de lire une biographie (Konrad et Ulrike MAUER – Alzheimer Vie d’un médecin, histoire d’une maladie) de Alois ALZHEIMER qui parle de KRAEPELIN de Karl August von SOLBRIG (1809-1872) qui inaugura la chaire de psychiatrie de l’université de Ludwig-Maximilan à Munich et de bien d’autres médecins toujours présentés comme psychiatres et non neurologues.
A lire ce livre, il semble que les psychiatres, puisqu’ils étaient psychiatres en titre) parlaient déjà à leurs patients et essayaient de les voir comme des êtres humains.
Freud n’a pas tout inventé, je crois qu’il a essayé de le faire croire et dans bien des domaines, il y est arrivé. Les psychiatres décrits dans ce livre essayaient d’avoir une démarche scientifique, avec autopsie de certains patients, mettant en évidence certaines malformations ou dégénérescences.
Enfin, c’et un large débat.
Respectueusement.
Merci à docteurdu16 et à Mouk d’avoir écrit ce que je pense très fort.
Doris : Juste une infirmière curieuse.
Bonsoir,
je suis en partie d’accord avec votre réponse. Freud n’est pas le premier médecin à avoir parlé aux fous. Il est probable qu’Hippocrate le faisait aussi. Et l’époque de Breuer (médecin généraliste), de Freud (neurologue), de Kraepelin marque le développement de la psychiatrie et de la recherche étiologique en dehors du déterminisme congénital.
Je ne considère pas la psychanalyse comme une vérité, c’est un modèle du fonctionnement psychique qui est fortement ancré dans notre culture. Il semble assez opérant dans le travail d’analyse des rêves (et il y a encore pas mal de personnes qui s’intéressent à ce que leur inconscient leur dit la nuit…), dans le travail de remémoration d’événements traumatiques. Là où je la trouve dangereuse, c’est lorsqu’elle stigmatise les personnes par leur structure, lorsqu’elle met à l’écart les familles, n’envisageant la thérapie que sur un mode individuel. Et là, elle n’échappe pas à la dérive de l’étiquetage. Je pense que les modèles systémiques laissent une bien plus grande possibilité d’évolution aux patients.
Alzheimer était un anatomopathologiste et je ne pense pas qu’il pensait que la relation soigne. Je pense que quelquefois les dégâts du cerveau, il reste de l’affect et que la relation soigne. Cela me semble valable pour les cérébrolésés, les Korsakov et Alzheimer…
Et Picorna, je n’ai pas bien compris si vous trouviez ça agréable ou désagréable de s’astiquer la nouille?
Quant à Perruche, j’ai un peu peur de sortir de votre sujet initial mais je pense que la médecine en général a intérêt à se questionner sur la psychiatrie et la relation thérapeutique.
A Winnibal
Non, Alzheimer n’était pas un anatomopathologiste ou alors pas uniquement, il était psychiatre et pratiquait des autopsies et des « coupes de tissus» comme Franz Nissl (lui aussi psychiatre) dont la méthode de coloration est encore pratiquée (enfin je crois). Difficile d’imaginer cela maintenant dans notre époque d’hyperspécialisation. Autopsies qui ont permis, entre autres, de faire avancer la connaissance de la syphilis et l’explication de toutes ses « paralysies » qui terminaient dans les asiles d’aliénés (puisque c’était le terme pour nos hôpitaux psychiatriques).
Non, il ne semble pas, à la lecture de la biographie que je suis en train de lire qu’Alzheimer pensait que la parole pouvait être du soin. Il voulait mettre en relation des pathologies psychiatriques et « dégâts anatomiques »: je écris cela pour faire simple.
Je ne sais pas si la parole soigne les patients alzheimer mais soin, écoute et attention peuvent les rendre peut-être « heureux ».
Respectueusement.
Vous posez la question qu’on doit tout le temps avoir en tête de savoir ce qu’est le « soin ».