« La nuit d’enfer » de J.M. March et G. Guégan

Je suis allé visiter la petite mais excellente exposition sur Art Spiegelman au Centre Pompidou. J’ai bien fait.

J’ai découvert un poème formidable « The Wild Party » de joseph moncure March. Ce texte a été publié en France dans une splendide édition grâce à sa redécouverte et aux illustrations de Spiegelman. La traduction française rend très bien le rythme jazz du texte. C’est un pur bonheur de lecture. Il faut le lire, d’une traite, comme on passe une nuit d’ivresse, d’amour ou de musique sans pause. Quand vous aurez commencé vous ne pourrez plus vous arrêter. Il y a les mots, leurs musiques, leurs sens et les dessins. La force du poème est dans le rythme, syncopé comme un morceau de bop. Il a le Beat. L’œuvre est totalement intemporelle et ancrée dans son époque, comme l’odyssée, comme la recherche du temps perdu, comme la tempête. C’est fort, très fort. On ne regrette qu’une chose, que March n’est pas poursuivi dans cette veine. Spiegelman est un immense dessinateur, en fait non, simplement un immense créateur. Regardez ses unes du New Yorker, lisez Maus et lisez La nuit d’enfer. Il y a en plus dans ce magnifique livre la version en anglais. Un livre complet, un cadeau parfait. Lisez le, regardez le, déclamez le, vous prendrez du plaisir comme Queenie, à vos risques et périls…

Un petit exemple:

En amour, tantôt on mouille, tantôt on rouille
Mais le sommet, c’est quand on dérouille.
Et, rapport à la quenouille, ce fut un géant.
Se martelant, s’emboitant, se tringlant,
Tels des incendiaires exaltés qui se jetteraient
Dans le brasier, et que le feu du désir aveuglerait,
Tels des trains souterrains qui feraient
Trembler la ville entière sur leurs rails brûlants,
Tels des locomotives hennissantes, écumantes,
Tels des foules piétinantes, et hurlantes.
Ils étaient si pleins d’ardeur que, les aurait-on
Désossés vivants, ils n’auraient rien senti.

La VO maintenant:

Some love is fire: some love is rust:
But the fiercest, cleanest love is lust.
And their lust was tremendous. It had the feel
Of hammers clanging; and stone; and steel:
And torches of the savage, roaring kind
That rip through iron, and strike men blind:
Of long trains crashing through caverns under
Grey trembling streets, like angry thunder:
Of engines throbbing; and hoarse steam spouting;
And feet tramping; and great crowds shouting.
A lust so savage, they could have wrenched
The flesh from bone, and not have blenched.

Bonne lecture.
Le poème a été écrit en 1926, voici un hit de cette année interprété par un autre génie:

Et comme il a été publié en 1928, un hit de cette année par la plus grande scatteuse que la planète jazz est portée:

Bonne écoute

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