Renaloo, le poil à gratter de la néphrologie française a lancé une enquête, le terme étude me parait un peu prétentieux, sur la décision partagée en néphrologie. Il s’agit d’une très bonne initiative. J’ai regardé avec intérêt les résultats, comme ceux de la cour des comptes précédemment.
J’ai été un peu déçu du nombre faible de personnes répondants. 1038 répondants sur 76187 (données REIN 2013) patients transplantés ou dialysés soit 1,36% des personnes concernées, je trouve ça peu. Je me demande si il est possible de tirer des conclusions, d’autant qu’il est peu probable que l’échantillon soit réellement représentatif de la population ciblée. Passons cet écueil méthodologique, pour un premier travail je trouve ça bien.
Première question:
Si vous ajoutez les réponses obtenues et la question ignorée vous avez 908+131=1039 (il y avait 1038 répondants). Je ne sais pas comment interpréter ceci, un hésitant? Finalement 1039 répondants? J’ai trouvé dommage que les résultats soient présentés d’une façon dichotomique rouge/bleu.
Pour moi, il aurait important de mettre le « pas du tout » à part, car il est très différent d’avoir eu une mauvaise information que pas du tout. J’ai trouvé bien que plus de 80% des personnes estiment avoir eu une bonne information sur la transplantation et la dialyse en centre. Il serait utile de savoir si l’information sur la transplantation préemptive était manquante ou mal donnée. Ceci permettrait d’orienter les centres transplanteurs sur le message à faire passez auprès de leurs correspondants.
Question 2:
Vous remarquerez qu’il y a toujours 1039 répondants ici. J’ai trouvé plutôt comme un bon résultat que plus de 2/3 des patients aient pu choisir leur traitement avec l’équipe médicale. Je m’attendais à un résultat plus mauvais. Je me demande quel chiffre est obtenu dans d’autres maladies chroniques comme le diabète ou l’insuffisance cardiaque. Nous pouvons faire mieux mais il semble que les néphrologues français est compris l’importance de l’empowerment du patient dans l’immense majorité des cas.
Pour la question 3, qui concernait uniquement les patients en dialyse en centre, vous remarquerez qu’il y a 167 patients, l’échantillon devient petit et probablement peu représentatif. Il y a 29455 dialysés en centre lourd ou UDM en 2013, l’échantillon représente ainsi 0,55% de cette population.
55% des patients ont participé au choix, ce n’est pas suffisant. Ce résultat est à interpréter avec précaution du fait du petit nombre de patients et surtout de l’absence de données sur le suivi pré dialyse et la durée en dialyse. Il est, malgré ces limites, certains qu’il peut être mieux fait dans le partage de la décision en dialyse.
Pour la question 4 qui était sur le besoin d’information, il faut manifestement plus parler de transplantation préemptive et de la liste d’attente. Pour le préemptif, le néphrologue a un rôle important à jouer. Pour la liste d’attente, j’ai le sentiment que c’est la structure qui là gère,l’ABM, qui doit donner les informations. Les techniques de domicile hors DP sont aussi à mieux présenter. Un résultat est bizarre pour la dialyse péritonéale, 41% disent avoir reçu une information insuffisante (cf Q1) mais seulement 18% souhaite avoir plus d’information. Il y a une forme dissonance cognitive à explorer.
Pour les questions suivantes qui concernent seulement les patients dialysés en centre ou UDM, 269 patients répondent à la question 5 alors qu’ils ne sont sensés qu’être 167 (question 3), on passe à 166 et une réponse ignorée à la question 6 (ce que je saisis mal, car la question est simple (êtes vous inscrit sur liste d’attente) et devrait avoir le même nombre de répondant que la 5 soit 269). Pour l’accès à la liste d’attente, question 6, plus de graphique, plus de nombre de répondants mais des pourcentages qui sont difficiles à comprendre. La question 6 nous apprends que 42% des 166 répondants ne sont pas inscrits, j’imagine que la question suivante était pourquoi? Si on prend les 3 lignes suivantes ont devrait avoir 100% et on obtient 58%. C’est difficile à saisir.
Pour la dernière question, pas de chiffre de répondant juste des %. Je ne m’étendrais pas sur ce dernier point du coup.
La présentation finit par quelques remarques qui sont sensés synthétiser l’enquête. C’est comme d’habitude une charge contre les néphrologues français. 2 patients sur trois s’estiment bien informés, ce qui je le répète est pour moi un résultat plutôt satisfaisant. Nous pouvons mieux faire, je crois que nous sommes sur la bonne voie. Je partage le constat qu’il est dommage que l’information sur le préemptif ne soit pas mieux faite. Je suis convaincu qu’une collaboration sereine avec les associations pourraient nous aider. J’ai envie de proposer plus d’informations à mes patients, j’aimerai bien qu’un patient expert à la sortie de la consultation ou de la réunion d’information répondent aux questions du patient et prolongent la discussion autour de la prise en charge de la suppléance.
Cette enquête a des défauts que j’ai essayé de pointer de façon constructive. Sa principale qualité est d’exister et de faire parler de maladie rénale chronique. Après ce coup d’essai, il y a la place pour faire un travail plus carré sur le plan méthodologique avec une sélection de patients plus représentatifs de la population et une analyse plus fouillée. Ceci permettrait de faire un bon état des lieux et d’identifier précisément les points à améliorer en terme de qualité de l’information.
Merci Renaloo pour cette ébauche et continuez à parler et faire parler de maladie rénale chronique. C’est important. Si vous pouviez aussi profiter de votre aura médiatique pour dire que nous devons mieux financer la recherche en néphrologie, ce serait très bien pour nous tous. En particulier des travaux en sciences sociales qui nous permettraient de progresser dans la prise en charge.