Rien ne remplacera l’errance dans une librairie pour découvrir un auteur au détours d’un rayon. Hier, petite promenade dans un de ces lieux en voie de disparition, j’aime sentir les livres, les toucher, les voir. J’aime les livres, l’objet livre, le grain du papier sentir les lettres déposés dessus et l’odeur du papier neuf ou vieux, toutes choses qu’aucun iPAD3,4 ou 25 n’apportera.
Je tombe sur un petit livre à la couverture particulièrement amusante, d’un éditeur que je ne connait pas Noir sur Blanc. Je feuillette, lisote, le papier est agréable, les illustrations de Chaval me font sourire. Elles sont toutes choisies avec pertinence.
Je ne connais pas du tout l’auteur, le quatrième de couverture l’annonce comme un célèbre dramaturge polonais. Je crois ne jamais avoir lu d’auteur polonais, j’avais tort.
Comme je soutiens les petits éditeurs et les libraires, j’achète ce volume. Je l’ai dévoré. 38 nouvelles en 200 pages de bonheur littéraire. Une exploration jubilatoire de l’absurdité de notre condition humaine et du tragique inhérent à notre mortalité. Il explore à travers des archétypes humains toutes nos lachetés, nos faiblesses, parfois notre grandeur, les faces sombres de notre ame, l’absurdité des systèmes aussi bien politiques que psychiques. Il démonte ces structures rigides qui nous enferme aussi bien sociales que nos prisons mentales. Toutes les nouvelles sont de petites merveilles qui nous font sourire, voir franchement rire , mais aussi réflechir.
Cet auteur a un immense talent, en quatre lignes vous voyez la situation, vous imaginez le visage de ces tristes héros, vous êtes dans ces situations banales qui dérivent vers le picaresque simplement car les hommes poussent la logique, leur logique, ou la logique sociale jusqu’à l’absurde, usant le système et en abusant. Il y a des descriptions de pure folie humaine, si humaine.
Un grand livre sur l’homme, il est entre le non sense anglais d’un Lewis Caroll avec « La chasse au Snark » et l’humour très noir d’un Max Aub avec ses « Crimes exemplaires ». Comme Caroll il pointe d’un regard affuté nos comportements absurdes et comme Aub il imagine que nos pensées deviennent des actes et les conséquences de ceux-ci.
Il se moque de l’ordre, la nouvelle « le misanthrope » est sublime, c’est un sommet, une rencontre redoutable de l’ordre et du destin.
Son talent est de nous faire sourire et réfléchir, au delà des scènes, les héros improbables ont des reflexions d’une grande profondeur. Aborder la question de la foi par l’aveu d’un joueur d’être un tricheur est un tour de force, il explore les limites de la pédagogie dans l’ile au trésor, la relativité dans le mystère de la vie. La présentation sous forme d’abécédaire est particulièrement futé. Même la postface est pleine d’enseignements, l’auteur ne pourra vous paraitre que sympathique.
Un petit exemple tiré « d’une nuit à l’hotel » :
A partir de ce jour-là, je cessai de penser logiquement. Une seule stupide souris est plus forte que toute la logique, et la logique ne provoque que des nuits blanches.
Pour tous ceux qui ont travaillé avec des souris, animal oh combien sans intelligence, saisirons l’ironie d’une telle phrase. Du plaisir, du rire, de la reflexion que demander de plus à un livre, rien. Si, la suite.
Bonne lecture et riez avec les aventures du commando-vampire, du cygne alcoolique, d’un tricheur et de malheureux chercheurs de trésors et pirates.
En tout cas tu en parles très bien, ça donne envie de le lire.
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