ZTF vers mars

https://apod.nasa.gov/apod/ap230213.html

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La revanche de l’humain sur l’IA

https://xkcd.com/2737/

Ces petites choses qui nous permettront de croire que nous sommes un peu plus que les machines

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Livres 2023 A

La première lecture fut « Fantaisies guérillères » de Guillaume Lebrun. Un texte d’une écriture très originale et franchement intéressante, il s’agit d’une relecture de la vie de Jeanne d’Arc style héroïque fantaisie. Il a une très bonne idée qu’il exploite excellement avec un style qui apporte beaucoup à cette histoire un peu folle d’une pucelle qui finira sur un bucher. Je vous le conseille si vous aimez les OLNI.

« La petite lumière » d’Antonio Moresco, un court livre mais au combien magnifique, c’est vraiment brillant, il y a une sensualité incroyable dans ce récit. La nature est décrite de façon magique, il est rare d’avoir le sentiment de touchez les arbres, de sentir la forêt, d’être ébloui. Il y a une grande poésie dans la rencontre onirique entre un homme et un enfant. J’ai très envie de me plonger dans l’œuvre de cet italien, une très belle expérience et découverte.

Un peu de science fiction cubaine avec « Planète à louer » de Yoss. Comment parler de la situation politique et sociale d’une dictature ? Le plus simple est de faire de votre ile une planète bien connue, la terre, et des dictateurs, des xénoespèces. C’est très bien écrit, les personnages sont touchants. Ca parle de sexe, de drogues, de violence, de désespoir des scientifiques qui n’ont rien pour travailler, d’exil. Belle découverte que cet auteur métalleux.

« Le prophète et le vizir » de Yves et Ada Rémy, deux nouvelles sur le pourtour de la méditerranée, si vous aimez les contes et en particulier les milles et une nuits pourquoi pas sinon, vous pouvez passer votre chemin sans regret.

« L’espion qui aimait les livres » de John Le Carré, que dire? Le dernière livre du maitre espion est excellent, on commence et on ne le lâche plus jusqu’au dernier point. Rien à dire, des personnages parfaits, des dialogues ciselés et la nostalgie à tous les coins de rues. Une vision sans concession de ce qu’est devenue la Grande Bretagne et ses services, un très bon roman d’espionnage so british.

« Petit traité bien cuit » de Jean-pierre Ostende qui contrairement à ce qu’indique son nom est marseillais. Un court texte sur la cuisine et surtout ses acteurs principaux, les chefs, drôle, lucide et parfois loufoque, un bon moment. J’adhère totalement à l’ode au Bouiboui, rien que pour ça vous pouvez le lire avant d’aller découvrir un bouiboui.

« La mémoire de riz » de Jean-Marie Blas de Roblès, un recueil de nouvelles remarquable. De la très bonne littérature, intelligent, cultivé, parfois vous sourirez, d’autres fois une larme viendra. Une rare combinaison entre émotion et logique, plus je lis du Blas de Roblès, plus je me dis que c’est un très grand auteur. Vous pouvez en plus jouer à essayer d’identifier à quel auteur vous fait penser la nouvelle. La nouvelle titre du recueil est terrible, une magnifique métaphore sur notre monde, où la beauté mange le savoir avec délectation et nous laissons faire, jusqu’à la folie. J’aime beaucoup cette phrase « Tout ce récit est vrai d’un bout à l’autre – du moins dans la mesure où le fait de se souvenir, d’écrire ou même d’exister ne nous transporte pas déjà dans l’univers incertain de la fiction-… ». Je ne vous direz pas dans quelle nouvelle elle se trouve vous laissant le plaisir de le découvrir en lisant.

« Ici ça va » de Thomas Vinau encore un court texte, de la poésie en prose, une histoire de reconstruction. J’aime beaucoup l’écriture de thomas Vinau, des phrases courtes, travaillées pour vous toucher, une écriture sans gras, à l’os et bourrée de poésie. Tout au long de la lecture, le bruit de la rivière vous accompagnera. Revenir sur les lieux de son enfance pour apaiser ses peurs, rénover une maison pour retrouver le sommeil, explorer les vieilles malles à la recherche de ses souvenirs. Une histoire de mémoire, d’où j’extrais cette phrase qui résume, peut être, un des objectifs de la littérature: « En rentrant je me suis dit que ce serait beau de pouvoir se prêter des souvenirs. » Ce texte est un manifeste antirésilience du moins dans son acception managériale du terme.

A ce propos, je vous conseille fortement le nouveau podcast de France culture, En-quête d’idées. La première série de quatre émissions porte sur la résilience, cette idée qui d’outil intéressant pour comprendre certains comportements humains est devenue une injection à la performance. Tout l’intérêt et les limites du concept sont explorés intelligemment pour que vous puissiez vous faire votre idée.

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Pour lutter contre ma vieillerie

Je vieillis alors j’oublie des trucs qui me paraissent importants. Je vais essayer de noter ce que je lis pour ne pas tout oublier avec le temps.

La formalisation d’un truc que plein de néphrologues utilisent pour s’orienter vers un myélome (on aime vachement les trous), le trou protéine albumine urinaire, en pratique ça ne marche que sur le ratio protéine/creatinine U est >50 mg/mmol et le seuil qui va vous faire dire ça sent le myélome c’est un trou à plus de 60 mg/mmol, dans le trou c’est bien évidement de la bonne vieille protéine de Bence Jones (des chaines légères libres).

La vitamine D parfois ça sert à quelque chose, prévention du diabète de type 2 en situation de prédiabète. Je pense qu’il est plus efficace de faire du sport et perdre du poids mais c’est mon avis de crétin de clinicien à deux balles. SMASH

Une très bonne revue sur l’alimentation et son impact chez le patient avec une maladie rénale chronique. Ça reprend les différents régimes, leurs bénéfices, leurs limites, ça précise bien leurs caractéristiques. La nutrition et le rein c’est vraiment un champ plein d’avenir.

Comment faire sa thèse de médecine, c’est franchement pas mal et utile pour commencer.

La prochaine fois qu’on vous parlera d’activer NRF2 pour faire de la néphroprotection vous pouvez sortir ce papier.

Comment le microbiote motive les souris à faire de l’exercice, j’attends avec tellement d’impatience les prélèvements de selles en même temps que ceux d’urine lors des controles antidopage.

La méta analyse sur les effets bénéfiques des gliflozines. Tout est écrit et bien présenté dans ce document et les supplementary data sont une mine pour le néphrologue. Un must read en néphroprotection.

Une confirmation en vraie vie du profil bénéfique (cardiovasculaire et rénale) et des risques (infections génitales et acidocétoses, désolé prescrire pas d’amputation) des gliflozines par rapport aux iDPP4 en fonction du contrôle glycémique. Une classe thérapeutique toujours aussi intéressante avec une réduction encore confirmée du risque d’insuffisance rénale aigue, ce qui est vraiment important pour les patients.

A quoi ça sert la créatine dans le gras ? Si du coup vous vous posez des questions sur l’évaluation de la fonction rénale chez le sujet obèse, voici un bon papier.

Comment la visite médicale et tout le reste des outils de l’industrie nous influence. Si vous vous dites que c’est les autres qui sont influençables et pas vous, c’est que vous êtes déjà sous influence.

Pour continuer dans le même genre un très chouette papier qui montre que la publicité directe aux consommateurs c’est pas une bonne idée. Association entre l’argent mis dedans et les dépenses de pour la molécule promue et surtout, le plus drôle, moins la molécule est cliniquement intéressante plus le labo va dépenser pour influencer le patient. Pour mémoire seuls deux pays autorisent cette pratique.

Du climat et de la chute des empires, ici les hittites.

Inhibition de PDE4 et sevrage alcoolique, des données précliniques et cliniques, on imagine que ça va aller vite pour avoir une réponse claire dans un bel essai randomisé. La molécule, apremilast, est déjà commercialisée pour le traitement du psoriasis.

Les variants rares dans les traits phénotypes complexes , pas un rôle majeur dans l’héritabilité par contre au niveau physiologique puissant pour identifier les gènes importants dans une voie et une nouvelle approche méthodologique très intéressante.

Impact sur la santé de la pollution intérieure, un commentaire très intéressant.

L’exposition à des radiations n’a pas d’impact mutagène sur les enfants des personnes exposées, un très intéressant article qui synthétise clairement les données issues de l’étude des enfants de Tchernobyl.

Un peu de musique, si vous aimez la guitare jazz, le nouvel album de stephen Ulrich. Pour les amoureux des Beattles et du piano solo, le maitre Mehldau au clavier, et pour finir le retour franchement très réussi du New Masada quartet de John Zorn, les deux volumes sont top.

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Vivement pas demain de thomas Vinau

Mon conseil de lecture en ces temps troublés. De courts poèmes en prose touchant et juste, pour se rappeler que gouter l’instant est important pour ne pas dire vital. Tendre et piquant, des oiseaux pleins d’oiseaux, des matins frais, des après-midi paresseuses et chaudes, de la nostalgie et un peu d’espoir en maintenant. La joie simple des odeurs et du gout, de voir ceux qu’on aime grandir comme on aurait aimé grandir.

Des pages de petits plaisirs qui vous interrogeront sur votre vie. Bonne lecture.

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Conseils d’écoute du 16 février 2022

Aujourd’hui, deux podcasts écoutés sur le chemin du travail, un Superfail sur la canicule de Chicago et un pourquoi du comment sur le mutualisme. Le point commun entre ces deux émissions, montrer que les interactions sociales complexes sont la base de la survie. Une preuve, si il en fallait encore une après deux ans de pandémie, que la réalité du vivant aussi bien en terme écologique qu’en terme social ne résiste pas au simplisme. Le rôle de la science est de dépasser le bon sens pour révéler la complexité. Parfois la science fait du simplisme et nourrit des idéologies qui n’ont pas fait du bien à la planète et à l’animal Homo Sapiens. Si pour expliquer la société ou le vivant, on vous donne une explication simple avec une voie unique sans rétroaction avec un seul exemple, c’est que probablement on fait fausse route.

Pour la canicule, il est facile de dire que c’est les pauvres qui meurent car ils sont pauvres, pas de climatisation, moins de savoir et puis ils sont pauvres donc pas comme nous, car on est toujours le pauvre de quelqu’un, une explication facile et rassurante. L’analyse d’Eric Klindberg montre que la mortalité est corrélée à la densité des infrastructures sociales indépendamment de la pauvreté. Pour résister à une catastrophe, il faut des liens faibles en gardant des infrastructures sociales, le boulanger du coin de la rue, l’association paroissiale, des services publiques, etc. Il faut un ensemble d’acteurs qui permet de faire société. Ce travail montre que pour survivre à un drame, le lien social est important. Les survivalistes qui pensent pouvoir vivre dans leur coin sans rien ni personne au moment de la catastrophe font fausses routes de même que la société libérale qui voudrait faire de nous des entrepreneurs de nous même. Nous ne sommes pas des êtres rationnels, sinon la publicité ne marcherait pas. L’humain(e) est un animal social, il a besoin pour exprimer son meilleur des autres et de collaborer autrement que par des liens financiers ou d’intérêts, même si il s’agit de moteurs puissants. Nous ne surmonterons pas la crise climatique sans nous envisager en société globale. Ceux qui pensent survivre sur leurs petites montagnes se trompent. La pandémie a montré que nous étions dans la même galère. Chaque fois que nous avons cru que nous avions surmonté le plus difficile, un variant est venu nous rappeler que nous ne sommes pas seul mais connectés. Si nous ne retenons pas cette leçon, la souffrance sera grande quand nous aurons atteint les 3 degrés de plus qui nous attendent car nous n’avons pas collectivement voulu changer.

Pour l’écologie, nous avons longtemps vécu dans un modèle qui est faux celui de la chaîne alimentaire linéaire, où la vie n’est que lutte sans place pour la collaboration. Il y aurait un superprédateur au sommet à qui tout profite sans rien en retour, ceci a justifié et justifie encore des visions très darwiniennes (en fait une lecture très superficielle du grand Charles) des liens sociaux et des approches type the winner take all. Comme c’est dans la nature, c’est que c’est bien. Cette vision pyramidale des relations dans le monde vivant n’est qu’un minuscule fragment de la réalité. Il occulte que la majorité des interactions entre êtres vivants sont des chaînes de mutualismes. Les exemples pris dans l’émission sont remarquables allant du très simple (pourquoi la punaise de lit arrivent à ne se nourrir que de sang) au formidablement complexe (la cote atlantique du Brésil et ses centaines d’espèces connectées). Ces modifications de perspectives sur la robustesse du vivant qui passent par des chaînes mutualistes redondantes devraient nous faire réfléchir à la survie de nos écosystèmes sociaux. Nous ne sommes que des animaux dans la grande chaîne du vivant. Notre gros cerveau nous a donné une puissance incroyable de modifications de l’environnement. Qui dit grande puissance dit grande responsabilité. Nous ne sommes qu’un maillon et nous avons besoins des autres vivants pour être en bonne santé, c’est le sens de One Health.

C’est passionnant de voir comment les idées simples et fausses persistent dans l’imaginaire collectif et poussent à faire de mauvais choix. La culture scientifique devrait servir à ça, montrer que rarement le vivant est simple. Il est complexe et ne repose jamais sur une vision du winner take all, car quand le winner n’a plus rien à prendre ils meurent comme les autres. Nous devrions être humbles devant la superbe complexité du vivant et la respecter en ne nous contentant pas d’explications simplistes alors que de toute évidence les questions sont ardues.

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Bonne année 2022 et surtout bonne santé

On y va un peu en reculant.

J’espère quelle sera plus lumineuse que le temps aujourd’hui.

Prenez soin de vous et de ceux que vous aimez.

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Deux ans et une Cinquième vague

La COVID-19 est dans sa cinquième saison en France, un feuilleton avec des épisodes qui se ressemblent tous, seul le héros grec change.

J’aimerai souligner à quel point cette maladie illustre la puissance de la biomédecine moderne. Il y a deux ans personne ne connaissait cette entité et nous avons maintenant son tableau clinique à peu près complet, des idées sur la physiopathologie des formes graves. Nous avons amélioré la prise en charge des patients et surtout nous avons des vaccins et des anticorps monoclonaux contre la bête à picots. Il n’y a aucune pathologie dans l’histoire humaine qui a été aussi vite identifiée et pour laquelle des approches thérapeutiques ont pu être aussi vite testées avec un certains succès. La science est très impressionnante quand on lui donne des moyens. Par contre, comme toujours en médecine, nous avons un temps de retard. Il est difficile de prédire l’évolution. L’omicron est un bel exemple de la force de ce processus au cœur du vivant. Nous avons une belle preuve que l’évolution n’est pas une théorie mais une réalité.

Avec ce nouvel épisode, nous revoyons les patients non vaccinés ou qui n’ont malheureusement pas répondu à la vaccination être hospitalisés et aller en réanimation. Comme avec les autres, nous réentendons les discussions sur l’efficacité des mesures, nous revoyons la mobilisation dans les hôpitaux, les fermetures de lits pour dégager du personnel, les internes qu’on va envoyer faire du COVID plutôt que de se former à leur métier, etc. Ce qui domine, immense lassitude. Nous sommes fatigués et je crains que nous ne finissions épuisé. Nous avions, au moment de la première vague, vécu un moment étonnant, les médecins avaient repris la main, car il fallait jouer avec l’incertitude, ce qui est au cœur du processus de soin. L’administration nous suivait, facilitant la lutte contre cette nouvelle maladie, c’était un moment intéressant, l’impression que pour une fois on nous faisait confiance pour organiser la prise en charge au mieux. Nous tirions dans le même sens. Il y avait quelque chose d’émouvant dans cette union et un message d’espoir pour l’avenir.

Certains avaient espéré que le politique avait compris que pour soigner il fallait des êtres humains. Et puis, le business est revenu « as usual ». On nous a agité un hochet, le Ségur, et puis on a continué à fermer des lits, à rogner sur le personnel. La logique qui existe depuis 20 ans était de retour, moins d’activité donc vous avez besoin de moins de personnel, et puis de toute façon il n’y a plus d’infirmières et d’aides soignante, vous croyez quoi. Débrouillez vous, travaillez plus, bande de fainéants. Le mantra de la rationalisation était de retour. On confondait encore le processus de soin avec une chaîne de montage ou avec un avion. Le temps du « on vous fait confiance » était évanoui, le temps de la défiance était de retour.

Les saisons du feuilleton COVID ont épuisés de nombreuses personnes pour des raisons diverses et variées. Elles s’en vont, elles quittent le boulot, elles vont faire autres choses ou travailler en cherchant des endroits moins maltraitants que l’hôpital public. On nous serine l’importance de la bienveillance et de la non malfaisance pour la prise en charge des patients. Ceci devrait s’appliquer aussi aux personnels des hôpitaux publics, nous aimerions un peu de bienveillance et de confiance pour mettre en place des soins de qualités. Le soin demande du temps. Il faut donner du temps à l’autre, l’homme ou la femme malade se plie mal à la logique d’un entrepôt Amazon. C’est de l’humain avec toute sa complexité, ses comportements irrationnels et sa beauté. Une consultation pour essayer de convaincre de faire un vaccin prend du temps si on veut bien la faire, elle demande de l’énergie, un peu de savoir faire, nous demander de faire toujours plus en moins de temps est irréaliste. Nous sommes au maximum de ce que nous pouvons faire. La perte de sens est la pire des maladies qui puisse toucher le soignant. L’impression de mal faire son travail est destructrice. Il est facile de prendre des décisions quand on est loin du patient, quand on n’est pas confronté à la peur, à l’angoisse. Les soignants doivent faire face à ça et encore plus en ces temps de COVID-19 qui tue. Nous demandons juste un peu de respect, un peu de confiance, le terrain a un savoir faire, il faut l’écouter. Pour soigner des êtres humains rien ne remplacera un autre être humain, bien formé, en forme, à qui on donne les coudées franches pour exprimer son potentiel.

Alors que nous voyons la vague géante d’Omicron montée, montée, qu’il n’y a plus de place en réanimation, que nous jonglons avec les besoins en hospitalisation, j’ai peur que le système public ne survive pas. A la fatigue succédera l’épuisement et je crains que nous ne nous en relevions pas. Je me demande si ce n’est pas l’objectif. Pousser à bout les soignants, pour finir d’achever l’hôpital public à la française, système loin d’être parfait mais qui n’est pas si mauvais que ça.

Bonne fin d’année quand même.

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Résistance typographique

Quand retourner une lettre devient un acte de résistance que peu de personnes auraient le courage de faire. Une leçon pour nous tous et toujours cette question qu’aurais-je fait ?

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« Notre maladie, leçons de liberté depuis un lit d’hôpital américain » de Timothy Snyder traduit par Olivier Salvatori

Nous allons rentrer après ce week-end dans la campagne de la future élection présidentielle. Je ne pense pas que la santé sera un sujet majeur des débats, la science encore moins. Les communicants partiront du principe que ce n’est pas un bon thème car trop négatif. Il rappellera trop la mauvaise période de la pandémie que nous pensons derrière nous, ce qui reste à prouver. Au cas où la santé s’invitait dans la campagne, je ne peux que vous conseiller la lecture de ce livre. Il décrit comment la santé commerciale a conduit les USA à dépenser le plus dans le monde pour la santé tout en ayant des indicateurs très mauvais. Nous prenons ce chemin depuis plusieurs années et nous commençons à en sentir les effets. Il y a encore un peu de temps, mais pas beaucoup pour modifier notre chemin et aller vers un système de santé qui rendent les individus libres à un coût raisonnable.

Timothy Snyder est un grand historien américain spécialistes des crimes de masse du XXé siècle. Son appréciation sur le système de santé US se fait à travers le filtre de son expérience d’historien. C’est passionnant et très enrichissant pour un médecin de lire ce travail. Le point de départ est son hospitalisation fin 2019 pour une appendicite compliquée d’un abcès du foie et son errance initiale dans les méandres de la médecine commerciale US. Il explique remarquablement bien son expérience de patient et je conseille à tout jeune (ou vieux) médecin de se pencher sur ses pages. Il pointe tous nos défauts, l’absence d’écoute, de transmission de l’information, le racisme systémique, le stress et surtout notre distraction (p 33). Le téléphone est l’ennemi du soin. Il l’illustre remarquablement bien quand on lui fait sa deuxième ponction lombaire (p. 34). Les écrans nous éloignent de la clinique. Nous devons apprendre à vivre avec sans être distrait du patient. Ce n’est pas facile. C’est un véritable enjeu éducationnel. Ceux qui pensent que le plus simple serait de virer les écrans se trompent. Nous ne pouvons nous en passer, ils sont utiles. Nous devons apprendre à dompter notre relation à eux et nous souvenir que le plus important dans le soin, c’est le patient. Il y a plein d’autres choses très bien vu sur les problèmes actuels de la prise en charge, l’obsession du protocole, de remplir toutes les cases qui prend un temps infini sans apporter de plus value sauf pour le financeur et ceux qui veulent nous fliquer en continu sous prétexte de qualité. Les médecins tireront un grand bénéfice à cette lecture et avec un peu de réflectivité pourront peut être modifier les pratiques pour les améliorer.

Son expérience de patient est marquée par la rage qui permet de survivre, ce que j’appellerai la gnack du vainqueur. Cette rage qui fait qu’on ne lâche rien et qui permet de se raccrocher à la vie alors que la faucheuse est en train de couper le dernier fil. Mais il montre que la rage ne suffit pas pour se soigner, je ne parle même pas de guérison. Il faut aussi de l’empathie. Ce qu’on pourrait appeler une raison de vivre, c’est à dire la présence des autres qui nous sont chers. Il lui a fallu les deux pour sortir de ce très mauvais pas. Je crois que ceci s’applique à tous. N’avoir que la rage ou l’empathie ne suffit pas. Certains auront plus de gnack, d’autre plus de besoin des autres mais comme pour marcher avoir deux jambes est plus simple pour se soigner avoir les deux est mieux. C’est le sujet de son prologue qui s’intitule solitude et solidarité et qui résume très bien la situation. Rien que pour ces première pages vous ne regretterez pas votre lecture.

L’introduction porte sur « notre maladie ». La maladie du système de santé américain est la médecine commerciale et ses dérives. Je trouve que cette phrase sur ce que devrait être la médecin résume très bien la situation et le problème (p20):
« La médecine a pour but non de tirer le maximum de profits de corps malades et de vies abrégées, mais de favoriser la santé et la liberté de vies allongées. »
Le système de santé uniquement accès sur la quête du profit pour quelques uns empêchent la mise en place de soins de qualité centrés sur la liberté du patient. Santé et liberté sont indissociables. Ce sera le fil conducteur de ses leçons pour guérir le système de santé. Ce que je trouve remarquable est que dans son discours l’individu et le collectif s’articulent et sont indissociables. Nous devons réfléchir à ça. La liberté individuelle est le fruit des libertés collectives. Tout le contraire d’un survivaliste.

La santé est la condition d’une vie libre. Quand nous sommes malades nous ne sommes plus libres nous sommes asservis à la souffrance, au malaise, à la perte de nos capacités. Une bonne santé est la première condition d’une vie libre. Une belle leçon que devrait méditer certains qui pensent que nous vivons dans une dictature sanitaire contre leur sacro-sainte liberté qui s’arrêtera quand ils ne pourront pas faire deux pas sans être essoufflés. C’est le thème de sa première leçon, « la santé est un droit de l’homme ». L’accès universel aux soins est la condition d’une bonne santé physique mais aussi mentale (p37). « Nos existences seraient moins anxiogènes et moins solitaires, car nous ne croirions pas que notre survie dépend de notre seule position économique et sociale. Nous serions plus profondément libres. » Ils montrent comment le fait de faire de l’accès aux soins un privilège génère un cercle vicieux de souffrances pour tous. Ici on sent bien l’impact de ses travaux sur les dictatures. On croit être dans le bon cercle, le problème c’est que plus l’inégalité augmente plus le cercle se réduit et à un moment on se trouve exclu du cercle pour finir sur un cercle qui n’inclut qu’une personne, le tyran… A partir de la page 41, il analyse le déséquilibre entre solitude et solidarité comme au cœur du problème. L’accroissement de la croyance en la réussite individuel, en l’entreprenariat du soi, au détriment du collectif fait le lit de douleur qui sera manipulé pour faire croire que la seule solution est encore plus de solitude et d’individualisme alors que la solution est dans un bon équilibre entre respects des droits individuels et solidarité pour permettre même aux plus humbles le droit d’être bien soignés. Il dissèque de façon très convaincante comment le discours du self made man a posé un problème sur la prise en charge de ses maux de têtes. Il compare comment on peut soigner avec de l’empathie et pas uniquement avec de la technologie. La crise des opioïdes lui offrent un très bel exemple (p 49-50). La réponse à la désocialisation a été la prescription de pilules qui ont rendus les gens toxicomanes alors que la réponse à la souffrance aurait du être de meilleures conditions de vie et un accès au travail. Ce qui montre soit dit en passant que la santé ne peut pas avoir qu’une réponse médicale mais ne peut avoir qu’une réponse globale. Comment être en bonne santé quand on ne sait pas ce qu’on mangera demain, comment être en bonne santé si on a pas accès à une eau de bonne qualité, comment être en bonne santé si on a pas des relations humaines ne se limitant pas au commerce? Dans les dernières pages ils dénoncent comme criminels ceux qui refusent l’accès aux soins universels. Ils montrent comment ces personnes utilisent la souffrance de la majorité pour le profit d’une petite minorité. C’est la médecine commerciale US.

La leçon deux, « le renouveau commence par les enfants », repose encore une fois sur son expérience personnelle. Il compare le système autrichien de la périnatalité qui est vraiment très protecteur pour les parents et donc les enfants, à l’absence de système américain autour de la naissance et de la petite enfance. Pour vous donner envie de lire, deux phrases que je trouve très intéressante et à méditer. « Le paradoxe de la liberté tient à ce que personne n’est libre sans aide. La liberté peut paraître solitaire, elle n’en exige pas moins la solidarité.  » Ce chapitre sur l’enfance et la nécessité de protéger les parents pour qu’ils puissent s’occuper correctement de leurs enfants est un bon exemple que la santé est un fait social global et pas uniquement médical. « Dès lors que les parents et les personnes qui s’occupent des enfants savent qu’ils ont tous droits à des soins de santé, il dégagent plus de temps et de patience pour aider les enfants à devenir libres. »

La troisième leçon, « la vérité nous rendra libre », ce chapitre est un comparaison entre les systèmes totalitaires qu’il connaît si bien et la gestion mensongère de la pandémie par le président Trump. Il souligne l’importance du savoir, de la science, et des médias locaux de qualité contre les réseaux sociaux globalisant qui ne se nourrissent que de la haine. Il rappelle quelques évidences, la vérité demande du travail, personne n’aime les mauvaises nouvelles, la connaissance est la base de la liberté. Il démonte l’air de rien le mantra du big data au profit de la vraie connaissance (p89). Ce chapitre est particulièrement riche et doit être lu avec attention. Quelques phrases : « Comment les réseaux sociaux pourraient-ils promouvoir la vérité dès lors qu’ils favorisent l’addiction? », intéressant non? « La liberté d’expression prend tout son sens dès lors que nous avons quelque chose à raconter. » J’adore celle ci. « La mort de la vérité entraîne celle des gens, car la santé dépend de la connaissance. » Spéciale dédicace à Cnews et sudradio. « Nous ne pouvons être libre sans la santé, nous ne pouvons être en bonne santé sans la connaissance. » Il finit son chapitre par l’importance d’avoir un socle de connaissances communes et partagées pour faire société. Il s’agit de la solidarité informationnelle qui permet la discussion qui n’a pas pour but de convaincre l’autre ou pire de le démolir mais de s’enrichir de la parole et de la pensée d’autrui.

La quatrième leçon, « redonner l’autorité aux médecins ». Il montre comment nous avons été dépossédé de la décision, certaines choses ici s’appliquent directement à la France de 2021. Les fermetures de lits, l’optimisation des lits qui doivent toujours être remplis et pas trop longtemps, le juste à temps qui est devenu le mantra de l'(dés)organisation hospitalière. La pensée magique sur la technologie qui va permettre de faire plus vite et mieux qu’une conversation avec le patient ou qu’un bon examen clinique les yeux grands ouverts vers le corps du soigné et pas vers l’écran du téléphone, de la tablette ou de l’ordinateur. Il dénonce les dossiers médicaux électroniques qui ne servent en fait qu’ optimiser la facturation, les algorithmes de décision qui pensent surtout à l’optimisation du remplissage des lits, etc. Enfin il déplore à juste titre la disparition de la médecin de premier recours aux USA. C’est une leçon, en passant de l’importance de pouvoir faire des études sans s’endetter sur des dizaines d’années. Nous devons absolument protéger le réseautage territoriale en spécialistes de soins primaires pour avoir un accès aux soins de qualité. Une petite phrase pour flatter notre ego: « Si nous donnions aux médecins l’autorité qu’ils méritent, nous serions tous en meilleure santé, et donc plus libres. »

La conclusion est simple, couverture médicale universelle comme un droit, recherche de la vérité par la connaissance reposant sur la méthode scientifique ou du journalisme de qualité et restauration de l’autorité des médecins (contre le lobby médico-industriel) voici le chemin du rétablissement. Nous ne devons pas suivre l’exemple américain. « Aucune propagande ne peut masquer la réalité fondamentale de la médecine commerciale américaine: nous payons un prix extrêmement élevé pour acquérir le privilège de mourir plus jeune. »

Ce texte est réjouissant, il est intelligent, bien écrit, bien documenté. La dialectique entre histoire individuelle et généralités est très pertinente. Il est une importante lecture pour ceux qui veulent penser la suite de notre système de santé. Si il y a une leçon à retenir de ce livre la santé est un fait global et politique et non pas comme certains voudraient le faire croire un problème médical et technocratique avec un seul choix, le bon. Il n’aborde pas vraiment le champ de la prévention mais c’est essentiel. Elle passe par ne pas faire la promotion de conduites dangereuses comme le tabagisme, la consommation d’alcool, la consommation de produit gras, salé et sucré. Si la santé est une affaire de l’individu, c’est aussi une affaire de la société qui se doit de protéger les plus faibles et les plus fragiles. Nous devrions donner comme droit à la publicité pour les aliments autant que ce que nous faisons de temps de formation à la diététique. En pratique, on peut interdire la publicité pour la boustifaille, ou alors il va falloir inventer une nouvelle matière tout le long de la scolarité. Comment voulez vous que nous luttions contre les messages publicitaires vantant une alimentation salée, grasse et sucrée, qui sont martelés ad nauseam? L’interdiction de la publicité alimentaire serait un premier pas pour promouvoir la prévention, comme la taxation des produits trop sucrés ou trop salés.

Je finirai en vous livrant les dernières phrases du livre: « Pour être libres, nous avons besoin de notre santé. Pour rester en bonne santé, nous avons besoin les uns des autres. » C’est probablement une bonne base de discussion pour parler d’un projet de société lors de la prochaine campagne présidentielle. Comment trouver le bon équilibre entre notre solitude (nécessaire) et la solidarité (indispensable)?

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